11 juin 2025
Le dessinateur de presse malaisien Fahmi Reza, qui devait se rendre quelques jours à Singapour le 7 juin pour assister à un concert, n’a pas pu embarquer à l’aéroport international de Kuala Lumpur. Les services de l’immigration lui ont notifié qu’il faisait l’objet d’une interdiction de quitter le pays émanant de la police, sans préciser le motif de cette mesure. Le 29 mai, Fahmi Reza avait été interdit d’entrée sur le territoire de l’État de Sabah par les autorités locales.
Ces restrictions surviennent quatre mois après que Fahmi Reza ait été arrêté à Sabah après avoir diffusé des dessins critiques du gouverneur de cet État, mis en cause pour corruption. Il fait depuis l’objet d’une enquête, notamment au titre de la loi sur la sédition.
Dans la presse locale, la police réfute l’existence d’une interdiction de déplacement, tout en affirmant que Fahmi Reza figure sur une liste de personne à surveiller en raison de l’enquête en cours le concernant.
Alors que Fahmi Reza entend contester en justice cette atteinte à sa liberté de circulation en tant que citoyen et artiste, Cartooning for Peace exprime toute sa solidarité avec un dessinateur dont l’œuvre critique vise à dénoncer les dérives du pouvoir au service du bien commun.
10 janvier 2025
Fahmi Reza de nouveau inquiété pour un de ses dessins
Le dessinateur malaisien Fahmi Reza a été détenu pendant 24 heures par la police de Sabah pour avoir affiché des dessins satiriques visant le nouveau gouverneur de l’État de Sabah, Musa Aman. Il a été libéré sous caution le 31 décembre 2024, en fin d’après-midi.
Le 30 décembre 2024, Fahmi Reza a été convoqué au poste de police du district de Penampang pour faire une déclaration concernant son dessin critique du gouverneur, où il a été arrêté et placé en détention sur décision d’un magistrat local en vertu de la loi sur la sédition.
Le dessin incriminé représente Musa Aman, tout juste nommé gouverneur de l’État de Sabah, tenant un billet de 100 Ringgit entre les dents. Bien qu’il n’ait jamais été condamné, ce dernier a été accusé de corruption pendant son mandat de ministre en chef de Sabah de 2003 à 2018.
Selon la presse locale, la détention du dessinateur est survenue dans le contexte de la tenue d’une manifestation de plus de 200 jeunes étudiants et militants, mobilisés contre la nomination de Musa Aman et appelant à la fin de la corruption dans l’État de Sabah.
Le dessin de Fahmi Reza a été diffusé sur le compte Instagram du dessinateur, puis reproduit sous forme de poster et affiché dans plusieurs lieux de Sabah, notamment à Kota Kinabalu, la capitale de l’État. Le dessinateur a partagé des photos de ces installations sur ses réseaux sociaux.
Selon l’enquêteur en charge de l’affaire, plus de 50 plaintes ont été déposées contre Fahmi Reza. D’après les médias, comme The Borneo Post, les plaintes ont été déposées principalement par des membres du parti au pouvoir, « Gabungan Rakyat Sabah » (Sabah People’s Coalition), ainsi que par des personnes et des groupes proches du parti. Mohd Syarezan Abdul Samat, Secrétaire de l’ONG « Pertubuhan Lima Generasi » de Sabah, a ainsi déclaré à la presse demander « au gouvernement de l’État d’interdire à Fahmi Reza, qui se trouve actuellement à Sabah, d’entrer dans l’État, car il ne fait que semer le chaos et perturber l’unité ».
Le 19 décembre 2024, l’artiste avait déjà été convoqué à Kuala Lumpur par la police royale malaisienne pour être interrogé sur sa représentation de Musa Aman. Peu de temps après, selon une déclaration de la section jeunesse du parti « People’s Justice Party (PKR) », le Premier ministre Anwar Ibrahim avait exprimé publiquement qu’il ne fallait pas poursuivre Fahmi Reza pour son œuvre satirique et que la critique du gouvernement et de ses dirigeants était acceptable.
Après avoir passé la nuit du 30 au 31 décembre en détention, Fahmi Reza a été libéré sous caution puis renvoyé à Kuala Lumpur. L’enquête est toujours en cours, le dessinateur étant poursuivi pour avoir prétendument insulté le nouveau gouverneur de l’État de Sabah, en vertu de la loi de 1948 sur la sédition.
Cette loi prévoit une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à trois ans et/ou une amende pouvant aller jusqu’à 1 100 dollars USD. Des groupes de la société civile et des militants des droits humains en Malaisie reprochent au Premier ministre Anwar Ibrahim de ne pas avoir tenu ses promesses électorales d’annuler les lois qui restreignent la liberté d’expression et étouffent la dissidence.
Face aux accusations de corruption visant le gouverneur de l’État de Sabah, le groupe de défense des droits Aliran critique l’arrestation de Fahmi Reza et appelle à ce que toutes les charges retenues contre lui soient abandonnées, mettant en avant que les citoyens ont « le droit constitutionnel d’exprimer pacifiquement leurs préoccupations sur ces questions d’intérêt public, comme l’a fait Fahmi à travers son art ».
Ce n’est pas la première fois que Fahmi Reza fait l’objet de poursuites en raison de son travail. Cartooning for Peace a alerté à plusieurs reprises sur son cas, et notamment en 2022 lorsqu’il avait déjà été poursuivi en vertu de la loi sur la sédition pour son dessin représentant un singe vêtu d’habits royaux. Depuis mars 2021, il a au moins été convoqué à neuf reprises par la police, arrêté à quatre reprises, maintenu en détention trois fois et inculpé deux fois.
Cartooning for Peace s’inquiète d’un nouvel acharnement judiciaire visant le dessinateur malaisien et suivra de près la procédure, tout en espérant que les poursuites à son encontre soient rapidement levées.